LOI N° 87-30 DU 28 DECEMBRE 1988 MODIFIANT LA LOI N°84-09 DU 04 JANVIER 1984 PORTANT CREATION DE L’ORDRE DES AVOCATS
EXPOSE DES MOTIFS
La loi n°84-09 du 04 janvier 1984 portant création de l’Ordre des Avocats a révélé à l’application
quelques lacunes et a suscité des difficultés d’interprétation et d’exonération de certaines de ses
dispositions.
C’est pourquoi, le présent projet de loi a été préparé, apportant
certaines modifications qui peuvent être regroupées pour une meilleure compréhension, sous les cinq rubriques suivantes :
1. Modification de pure forme.
Ces modifications visent :
• L’article 38,concernant la liste du stage dans lequel l’expression
« la liste du stage » a été préférée à celle plus précise qui avait été employée et qui était « une liste du stage » ;
• L’article 39dans lequel le terme « Cours » a été ajouté avant le mot « tribunal »
dans le paragraphe où il est question du « respect dû aux tribunaux » ;
• Les articles 41 et 42 relatifs aux stages faits auprès de barreaux étrangers,
dans lesquels la précision concernant la réciprocité a dû être enlevée car il ne s’agit pas d’un établissement mais d’un stage.
2. Modifications destinées à apporter plus de clarté dans l’interprétation de certains articles ou plus de facilité dans leur application.
Ces modifications se trouvent :
• L’article 5qui concerne les cas dans lesquels une personne peut plaider et postuler, par dérogation à la règle qui donne aux avocats
le monopole de la représentation. Des hésitations ayant été constatées sur le point de savoir si les personnes morales pouvaient se prévaloir des dispositions
concernant l’administration provisoire ou le curateur d’office visés à la fin de cet article 5,
il a paru préférable d’accoler le mot « physiques » au mot « personnes » pour préciser quelles sont les personnes concernées.
• L’article 6dans lequel les mots « Justices de paix » ont été remplacés par « Tribunaux départementaux ». En outre, compte tenu
de l’augmentation de la compétence de ces juridictions et de l’esprit de cet article, il a été ajouté que la restriction au principe posé à l’article 4, ne s’appliquait pas devant ces juridictions aux « personnes
morales de droit privé autre que les sociétés nationales et les sociétés d’économie mixte » ,
• L’article 27qui prévoit l’éventualité de la démission ou du décès du Bâtonnier, situation qui n’était pas réglementée ;
• L’article 35qui prévoit dorénavant
expressément que l’enquête sur la moralité des postulants détermine l’admission au stage ;
•L’article 43qui permet de dispenser
également du stage les professeurs agrégés des facultés de Droit ;
•Les articles 44 et 53qui harmonisent les délais en matière
de prononcé d’une sanction disciplinaire.
3. Modifications destinées à apporter plus de célérité dans les jugements de contestation d’honoraires.
Le règlement des contestations d’honoraires revêt de plus en plus d’importance et requiert de plus en plus de vigilance
et de célérité. C’est pourquoi les articles 78, 79 et 80 alinéa 2 ont été modifiés. Il a été prévu,
pour tenir compte de l’urgence et du caractère contractuel de la convention passée éventuellement entre l’avocat et son
client qu’au cas où le Premier Président de la Cour d’Appel de statuerait pas dans le délai prévu, l’ordonnance du président
du Tribunal régional on à défaut la décision du Bâtonnier deviendrait exécutoire d’office.
4. Modifications tendant à apporter plus de sécurité dans la protection du secret professionnel des avocats
et dans le respect des droits de la défense.
Le Code de Procédure pénale dans ses articles 48 et 87 alinéa 3 prévoyait seulement que le magistrat saisi avait
« l’obligation de provoquer préalablement toutes mesures utiles pour que soit assuré le respect du secret professionnel et des droits de la défense ».
Il est apparu nécessaire de préciser dans le texte portant statut du Barreau de l’article 55, ce que cette disposition recourait.
Il a donc été ajouté dans les alinéas 2 et 3 nouveaux de l’article 55 que la perquisition ne pouvait se faire que par un magistrat assisté du Bâtonnier ou de son représentant.
Dans le même ordre d’idée, il a prévu à l’article 4 nouveau que lors de l’enquête préliminaire, c’est un magistrat spécialement désigné par le Procureur Général près la Cour
d’Appel qui interrogerait l’avocat dont la déposition s’avèrerait nécessaire, dans toute procédure autre que celle de flagrant délit,
5. Modifications tendant à résoudre les difficultés d’ordre juridique et pratique nées de la mise en œuvre de l’article 82 qui prévoyait
l’institution d’une Caisse de règlements pécuniaires des avocats dont le fonctionnement était fixé par décret.
Il a semblé opportun pour résoudre les problèmes posés, d’adopter une solution assurant à la fois la sécurité des justiciables et la nécessaire indépendance de la profession d’avocat.
C’est ainsi qu’il a été décidé de laisser au Barreau le soin de créer un organisme de règlements pécuniaires des avocats et d’en préciser lui-même les règles de fonctionnement.
Cependant, un certain nombre de règles nécessitant l’intervention du législateur, notamment l’adhésion obligatoire de tous les avocats et l’insaisissabilité des comptes et sous-comptes ouverts
dans l’établissement bancaire qui sera choisi par le Barreau, le nouvel article 82 pose les principes légaux sur lesquels seront basés les statuts du futur organisme.
Compte tenu de ces nouvelles dispositions, la loi n°86-21 du 16 juin 1986et le décret n°86-782 du 30 juin 1986 deviennent désormais sans objet, c’est pourquoi,
le présent projet de loi prévoit leur abrogation dans un dernier article.
L’assemblée nationale a délibéré et adopté en sa séance du jeudi 10 décembre 1987 ;
Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :
Article premier : les articles 5, 6, 35, 37 alinéa premier, 38, 39 alinéa premier 2, 41, 42, 43, 46, 53 alinéa premier, 78, 79 et 82 de la loi n°84-09
du 04 janvier 1984 sont abrogés et remplacés par les dispositions suivantes :
« Article 5.- Toutefois, toute personne peut plaider et postuler, verbalement ou par mémoire, soit pour elle-même, soit pour ses cohéritiers, soit pour ses parents et alliés sans exception
en ligne directe et jusqu’au second degré inclusivement en ligne collatérale, le mari peut de même plaider et postuler pour sa femme,
celle-ci pour son mari, le tuteur pour ses pupilles, ou l’administrateur provisoire ou le curateur d’office pour les personnes physiques qu’il représente. Ces représentants légaux sont dispensés
de la justification de leur mandat ».
« Article 6.- Devant les tribunaux départementaux, le ministère de l’avocat n’est pas obligatoire et les parties peuvent se faire représenter par un mandataire de leur choix agréé
par le juge et muni d’un pouvoir écrit spécial, sauf lorsqu’il s’agit des personnes morales de droit privé autres que les sociétés nationales et les sociétés d’économie mixes ».
« Article 35.- Une enquête sur la moralité des postulants est faite par les soins du Conseil de l’Ordre et déterminent l’admission au stage.
« Article 37.- L’admission au stage est prononcée par le Conseil de l’Ordre au plus tard le 31 janvier de l’année ».
« Article 38.- Les avocats stagiaires sont inscrits sur la liste du stage d’après la date de leur admission ».
« Article 39.- alinéa premier 2° L’assiduité à un enseignement des règles, traditions et usages dans la profession et notamment, du respect dû aux Cours et Tribunaux ».
« Article 41.- Le stage peut être fait au Barreau du Sénégal ou pour partie au barreau d’un Etat accordant la réciprocité par périodes successives sans interruption de plus de trois mois,
sauf en cas d’appel sous les drapeaux ».
« Article 42.- Lorsqu’il est commencé au Barreau d’un Etat accordant la réciprocité, le stage doit obligatoirement être poursuivi au Barreau du Sénégal pour une
période terminale d’une durée d’une année au moins ».
« Article 43.- Sont dispensés du stage : les anciens membres de la Cour suprême autres que les auditeurs, les anciens magistrats des cours et tribunaux ayant au moins dix années d’exercice affectif de leur profession.
Sont également dispensés du stage, les agrégés des facultés de droit ».
« Article 46.- Aucune peine disciplinaire ne peut être prononcée sans que l’avocat mis en cause ait été entendu ou rappelé, avec délai d’un mois. Ce délai est de dix jours francs
dans les cas prévus à l’article 53 ; alinéa 1er ».
« Article 53,alinéa premier.- Toute faute, tout manquement aux obligations que lui impose son serment, commis à l’audience par un avocat doit être consigné au plumitif d’audience. Le Conseil de l’Ordre, saisi immédiatement
sur réquisition du Ministère public, doit statuer dans le délai de vingt jours francs ».
« Article 78.- L’avocat et la partie sont convoqués, avec délai de huit jours, à compter de la réception de la contestation, par le greffier en chef par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par transmission administrative avec récépissé.
Le Président les entend contradictoirement en Chambre de Conseil et procède à toute mesure d’instruction utile. Il statue dans les trois mois du dépôt de la contestation, par ordonnance, dans
les limites du barème de référence prévu aux articles 20 et 69, sauf s’il existe une convention d’honoraires entre les parties.
Cette ordonnance est notifiée dans les quinze jours de sa date à l’avocat et à la partie par le greffier en chef du tribunal régional, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, les parties peuvent se pourvoir devant le Premier Président de la Cour d’Appel.
Le Premier Président est saisi par lettre recommandée avec demande d’avis de réception adressée au greffier en chef.
Si le président du tribunal régional n’a pas pris l’ordonnance dans le délai prévu au deuxième alinéa de l’article 78, l’avocat de la partie peut saisir le Premier Président de la Cour d’Appel sans condition de délai.
Le Premier Président de la Cour d’Appel statue par ordonnances suivant les règles de procédures fixées à l’article 78.
L’Ordonnance est notifiée par les soins du Greffier en chef de la Cour d’Appel par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ».
« Article 62.- L’Ordre des Avocats du Sénégal est tenu de créer un organisme de règlement pécuniaire auquel tous les avocats inscrits au Tableau sont affiliés de plein droit et obligatoirement. Cet organisme est destiné à centraliser,
dans un compte unique, les fonds, effets et valeurs reçus par les avocats à l’occasion de l’exercice
de leur activité professionnelle.
Il en dresse l’acte constitutif, en arrêt les règles de fonctionnement qui sont notifiées au Procureur général près la Cour d’Appel, lequel a la faculté d’en déférer les dispositions à la Cour d’Appel, s’il estime
qu’elles sont contraires à la loi ou n’assurent pas les garanties et contrôles nécessaires.
Le compte de cet organisme est d’ordre public, insaisissable pour quelque cause que ce soit.
Il en est de même pour chaque sous compte qui, ouvert au nom de chaque avocat, constitue, pour ce dernier,
le compte de dépôt professionnel obligatoire prévu par l’article 65.
Tous règlements, emplois, dépôts, séquestres directement liés à l’activité professionnelle des avocats ne peuvent s’effectuer que par l’intermédiaire de cet organisme ».
« Art 2- Les articles 27, 55, et 80 de la loi n°84-09 du 4 janvier 1984 sont complétés par les dispositions suivantes :
« Article 27,alinéa 3.- les élections générales ont lieu à l’époque et pour le temps fixé par le règlement intérieur de l’Ordre. Les élections partielles sont faites dans les deux mois de l’évènement qui les rend nécessaires.
Toutefois, si cet évènement survient pendant les vacances judiciaires ou dans les deux mois qui les précèdent, il n’est procédé aux élections qu’à la rentrée judiciaire.
L’avocat contre lequel a été prononcée la sanction prévue à l’alinéa 2 de l’article 45 ne peut, pendant la durée de cette sanction être élu ni comme un Bâtonnier, ni comme membre du Conseil de l’Ordre.
En cas de décès, démission ou empêchement grave du Bâtonnier, l’intérim est assuré par le membre du Conseil le plus ancien dans l’ordre d’inscription au Tableau et les élections ont lieu dans les délais précisés à l’alinéa 1er du présent article ».
« Article 55,alinéa 2,3 et 4.- S’il y a lieu, la perquisition au cabinet d’un avocat ne peut s’effectuer, à peine de nullité absolue que par un magistrat en présence du Bâtonnier ou de son représentant.
Le Bâtonnier ou son représentant assiste le magistrat dans la recherche et la saisie de documents ayant un rapport direct avec l’objet de la perquisition.
Un avocat ne peut être entendu en enquête préliminaire que par un magistrat spécialement désigné par le Procureur général près la Cour d’Appel. Il n’en est pas de même en matière de crime ou de délit flagrant.
En cas de poursuites pénales, le Bâtonnier doit être préalablement informé ».
« Article 80,alinéa 2.- Si le Premier Président de la Cour d’Appel n’a pas pris d’ordonnance dans le délai prévu au deuxième alinéa de l’article 78, l’ordonnance du Président du tribunal régional ou à défaut
la décision du Bâtonnier est considérée comme non déférée et devient exécutoire d’office ».
« Art 3- Sont abrogés toutes dispositions législatives ou réglementaires contraires à la présente loi, notamment la loi n°86-21 du 16 juin 1986 et le décret n°86-762 du 30 juin 1986.
La présente loi sera exécutée comme loi de l’Etat.
Abdou DIOUF