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Les 10 et 11 novembre 2015, s’est tenu, à Dakar à l’hôtel « Lagon II », un atelier sur le mandat de dépôt, l’aménagement des peines et les peines alternatives organisé par l’Observatoire National des Lieux de Privation de Liberté (ONLPL) en partenariat avec le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) et le Bureau régional pour l’Afrique de l’Ouest du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.
Cette rencontre a regroupé des magistrats des régions de Dakar et de Thiès, particulièrement des juges d’instructions, Présidents de Chambres d’accusation, Présidents de juridictions de grande instance et d’instance, magistrats du parquet et juges d’application des peines, mais également des représentants de l’Ordre des avocats, de la Direction de l’Administration pénitentiaire, de la Cour suprême et des organisations des droits de l’Hommes et de la société civile (C.F liste des participants).
Dans son discours d’ouverture, Monsieur Boubou DIOUF TALL, Observateur National des Lieux de Privation de Liberté, après avoir rappelé l’importance de cet atelier, tenu après ceux de Saint- Louis et Kaolack, a exposé l’objectif de cette rencontre qui est de donner suite aux recommandations issues des conclusions de l’atelier national sur la situation carcérale organisé par ladite institution les 16 et 17 décembre 2013 à Dakar. Il a, par ailleurs, tenu à exprimer sa satisfaction par rapport aux efforts notables faits par l’Etat du Sénégal au plan législatif par l’adoption de la nouvelle carte judiciaire, mais également au plan matériel par le relèvement de l’indemnité journalière du détenu, le projet de constructions de nouvelles prisons et la dotation de nouveaux véhicules à l’Administration pénitentiaire . Il s’est également réjoui de la fourniture à l’Observatoire National des Lieux de Privation de Liberté de moyens importants qui lui permettront de mieux remplir sa mission. Il a terminé son discours par des remerciements adressés aux partenaires internationaux et la société civile pour leur appui à l’institution qu’il dirige.
Dans son allocution, le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Sénégal, Maître Mbaye GUEYE, a exposé la situation générale des prisons du Sénégal qu’il juge préoccupante. Il a surtout appelé à la modification de certaines dispositions législatives favorisant la surpopulation carcérale comme la loi criminalisant le trafic de drogue au Sénégal. Il a aussi déploré la systématisation du mandat de dépôt dans certains Parquets et préconisé la dotation de moyens à l’Administration pénitentiaire.
Dans son discours, le chef du bureau régional pour l’Afrique de l’Ouest du Haut-commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme après s’être réjoui de la tenue de l’atelier, a rappelé les principaux objectifs de la rencontre qui sont, conformément aux recommandations formulées lors de l’atelier tenu en décembre 2013 à Dakar, de réfléchir, d’une part, sur les causes des dysfonctionnements judiciaires dont la surpopulation carcérale est la conséquence, et d’autre part sur les solutions à apporter à cette situation.
La représentante du Comité International de la Croix Rouge a, pour sa part, rappelé aux participants le parcours de cette initiative auquel le CICR a prêté appui depuis sa naissance en décembre 2013 durant l’Atelier National sur la Situation Carcérale au Sénégal. Le CICR a félicité les participants pour leur engagement ainsi que l’Etat du Sénégal dont les efforts tendent à remédier aux effets négatifs de la surpopulation carcérale avec notamment la création des Chambres Criminelles dont le bon fonctionnement devrait permettre de diminuer les longues détentions.
Dans son allocution, Madame Aminata FALL CISSE, Directrice de cabinet du Garde des Sceaux, Ministre de la justice, qui présidait la cérémonie d’ouverture, après avoir exprimé sa satisfaction sur la tenue de l’atelier, a rappelé les différentes étapes qui ont précédé celui-ci. Elle a souligné la nécessité d’augmenter le nombre d’acteurs judiciaires (magistrats, Greffiers etc.) pour un traitement diligent des affaires ainsi que celle d’améliorer l’alimentation et la santé des personnes détenues. Elle a également insisté sur la nécessité d’une meilleure pratique judiciaire consistant notamment à faire de la détention provisoire une mesure exceptionnelle. Elle a par ailleurs invité les participants à réfléchir sur les obstacles à la mise en œuvre des peines alternatives. Enfin, après avoir fait un exposé des réalisations faites par l’Etat dans le sens d’améliorer la situation carcérale (mise en place des Chambres Criminelles, augmentation de l’indemnité journalière du détenu, création de l’Observatoire National des Lieux de Privation de Libertés…), elle a magnifié la qualité de l’appui apporté à l’Etat par la communauté internationale dans ce domaine et déclaré ouverts les travaux.
Les travaux se sont déroulés en trois étapes : un premier panel sur le mandat de dépôt tenu dans la matinée du 10/11/2015, avec comme modérateur Monsieur le Procureur Général près la Cour d’appel de Dakar, Lansana DIABE SIBY, un second panel tenu dans l’après-midi du même jour sur l’aménagement des peines et les peines alternatives avec comme modérateur le Procureur Général près la Cour d’appel de Thiès, Monsieur Boubacar Albert GAYE, et, le lendemain 11 novembre 2015, des travaux en sous atelier portant sur les différents thèmes abordés dans les panels.
Introduisant le premier panel sur le mandat de dépôt, Monsieur Ibrahima Hamidou DEME, Substitut Général près la Cour d’appel de Dakar, après avoir rappelé les dispositions légales prévoyant le mandat de dépôt du Procureur de la république, en l’occurrence celles de l’article 63 du code de procédure pénale, a relevé, pour le déplorer, l’insuffisance de l’encadrement de ce pouvoir du Procureur de la république. En effet, selon lui, en dehors de l’exigence de la flagrance ou de l’aveu, devant le Ministère public, de la personne poursuivie, le texte précité n’a prévu que l’obligation de motivation du mandat de dépôt, laissant ainsi au magistrat du parquet une grande liberté d’appréciation sur la détention provisoire de la personne conduite devant lui. Il a également évoqué, comme causes de la systématisation des mandats de dépôt notée dans la pratique des parquets, le volume trop important des affaires, le manque de temps pour une étude sérieuse des dossiers d’arrestation et l’absence de débat contradictoire entre le magistrat du parquet et le mis en cause à qui il n’est pas souvent permis de s’expliquer amplement sur les faits qui lui sont reprochés. Il a terminé son intervention par un certain nombre de propositions de nature, selon lui, à lutter contre la systématisation des mandats de dépôts au parquet. Il s’agit de l’encadrement légal de la pratique du retour de parquet, de l’élargissement du champ d’application de l’amende de composition à certains délits, la responsabilisation des substituts au niveau des parquets, la dépénalisation de certains délits comme le vagabondage et la transformation de certains délits (défaut d’assurance) en contravention.
Dans sa communication sur le même thème, Monsieur Oumar Maham DIALLO, Juge d’instruction en charge du 3ème cabinet au Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar, a d’abord exposé le régime juridique du mandat de dépôt décerné par le Juge d’instruction en rappelant les dispositions légales en la matière, notamment les articles 113, 125 et 127 du code de procédure pénale. Il a ensuite relevé qu’à la différence du droit français (article 144 du Code de procédure pénale français), le droit sénégalais, en l’occurrence l’article 113 du code de procédure pénale, même s’il prévoit l’obligation de motivation des mandats de dépôt, ne donne aucun détail sur les motifs qui peuvent justifier le placement en détention d’un inculpé. C’est ainsi que, selon lui, dans la pratique, des motifs sommaires sont invoqués par les Juges. Ils vont (les motifs) du risque de troubles à l’ordre public au manque de garanties de représentation en justice en passant par l’entrave à la bonne marche de l’information. Ainsi, fait-il observer, même si ces motifs s’inspirent largement du texte français, il n’en demeure pas moins que la pratique judiciaire en la matière n’est pas conforme à ce principe adopté par le législateur sénégalais qui veut que la détention reste toujours l’exception. Abordant la problématique des longues détentions provisoires, le Juge DIALLO, a fait remarquer qu’elle ne se pose qu’en matière criminelle et dans les cas où le mandat de dépôt est obligatoire. Il a cité comme causes de ce phénomène l’insuffisance du nombre de magistrats au Sénégal, le manque d’infrastructures (le Palais de justice de Dakar ne pouvant accueillir de nouveaux cabinets d’instruction), la rareté, par manque de moyens, des investigations scientifiques (preuves ADN, relevés d’empreintes digitales etc.) faisant que le système de preuve reposant principalement sur les témoignages, aveux et constatations matérielles, prolonge l’instruction là où le recours aux preuves scientifiques la raccourcirait. Il a également énuméré, comme autres causes de longues détentions, l’exécution tardive ou l’inexécution des délégations judiciaires par les officiers de police judiciaires, le délai anormalement long entre le renvoi en jugement et la tenue effective du procès. Le manque de garantie de représentation en justice de certains inculpés explique, par ailleurs, selon lui, la réticence des Juges d’instruction à accorder des mesures de liberté provisoire. Il a exposé les efforts fournis par l’Etat pour remédier à la situation, notamment le recrutement massif de magistrats ces dernières années et la mise en place des Chambres Criminelles en lieux et places des Cour d’assises, mais a déploré le fait que les Chambres Criminelles siègent en session comme les Cour d’assises, ce qui constitue un facteur de lenteurs des procédures. Il a ainsi proposé, comme solution, la mise en œuvre rapide de la réforme de la carte judiciaire avec l’installation des Tribunaux de grande instance de Rufisque et de Pikine, ce qui contribuera, selon lui, au désengorgement des cabinets d’instruction du tribunal de grande instance hors classe de Dakar. Il a conclu son intervention en exprimant sa circonspection sur le projet de la limitation à trois ans du délai de validité du mandat de dépôt en matière criminelle et sur l’institution, proposée, d’un juge des libertés et de la détention aux motifs, pour la première question, que la libération de certains inculpés poursuivis pour des faits graves peut entraver la suite de la procédure en raison des carences relevées dans l’adressage, ce qui de nature à ne pas assurer une représentation en justice ; pour la seconde question, que le Juge d’instruction ayant le même niveau de formation que le Juge des libertés et des détentions et une meilleure connaissance du dossier, cette institution préconisée ne parait pas opportune.
Dans sa communication portant sur le même thème, Monsieur Ahmadou Moustapha FALL, Conseiller à la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Dakar a mis l’accent sur le contrôle de la Chambre d’accusation en matière de détention provisoire. Il a ainsi présenté les différents niveaux de ce contrôle qui s’exerce sur la mesure de placement en détention, sur le traitement diligent des affaires impliquant des détenus et sur les lieux de détention provisoires. Sur le contrôle du placement en détention, le Conseiller FALL, après avoir exposé des éléments de jurisprudence de la Chambre d’accusation sur les différents aspects de ce contrôle (légalité et opportunité), a préconisé l’institution d’un « référé-détention » qui permettrait à l’inculpé de disposer d’une voie de recours (inexistante en l’état actuel de notre législation) contre la décision de placement sous mandat de dépôt. Selon lui, ce système pourrait permettre de lutter contre la surpopulation carcérale car consistant à soumettre à l’appréciation d’une juridiction collégiale (qui devra statuer dans un bref délai – cinq jours au maximum -) l’opportunité d’un placement en détention. Concernant le contrôle exercé par la Chambre d’accusation sur le traitement diligent des procédures impliquant des personnes détenues, le Conseiller FALL a abordé ses différents caractères (administratif et juridictionnel). Il a ainsi exposé certaines causes de lenteur des procédures d’instruction relevées par la Chambre d’accusation à l’occasion de l’exploitation des notices trimestrielles. Il s’agit des retards dans l’exécution des délégations judiciaires et mandats mais également des retours tardifs aux cabinets d’instruction des dossiers transmis en règlement définitif au Parquet. Il a ainsi proposé comme solution une modification de l’article 169 alinéas 2 du Code de procédure pénale tendant à sanctionner le délai de 15 jours imparti au Procureur de la république pour transmettre ses réquisitions au magistrat instructeur. S’agissant du contrôle exercé sur les lieux de détention, l’exposant, après en avoir présenté le cadre légal, a préconisé une modification de l’article 212 alinéa 2 du code de procédure pénale dans le sens d’élargir les pouvoirs du Président de la Chambre d’accusation prévus par ce texte à la situation des accusés détenus provisoires dans l’intervalle des sessions criminelles.
A la suite de ces trois communications, les débats ont été ouverts et des discussions enrichissantes sur les points développés par les communicateurs ont eu lieu. Ensuite, la séance a été suspendue pour être reprise dans l’après-midi avec la deuxième partie des travaux portant sur l’aménagement des peines et les peines privatives.
Abordant le premier sous-thème relatif à l’aménagement des peines, Monsieur Cheikh DIAKHOUMPA, Substitut Général près la Cour d’appel de Dakar a, dans son exposé, fait un bref rappel des dispositions légales régissant la matière et les innovations apportées par le décret 2001-362 du 04/05/2001 relatif aux procédures d’exécution et d’aménagement des peines. Il a surtout insisté sur la nécessité d’un meilleur encadrement des mesures de libération conditionnelle dont l’utilisation intempestive peut faire perdre à la peine son caractère dissuasif. Il a également relevé, comme obstacle à l’application efficiente des modes d’aménagement des peines, le défaut de mise en place des organes comme le Comité de suivi en milieu ouvert et le Comité d’aménagement des peines.
Toujours sur le même sujet, Monsieur Papa Abdoulaye DONDE, Juge d’application des peines au Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar a, tout comme son prédécesseur, rappelé le régime juridique des modes d’aménagement des peines et déploré l’absence de mise en place des organes indispensables à leur mise en œuvre effective. Il a fait remarquer, par ailleurs, que l’avis consultatif de la Commission pénitentiaire d’aménagement des peines n’est pas souvent pris en compte lors de l’octroi des mesures de libération conditionnelle et a plaidé pour l’augmentation des prérogatives de cette commission eu égard à la qualité de sa composition (Juge d’application des peines, Procureur de la république et agents de l’administration pénitentiaire). Il a également formulé diverses propositions comme la juridictionnalisation des fonctions du Juge d’application des peines, le renforcement de ses moyens (mise à disposition d’un cabinet composé d’un secrétariat et d’un Greffier), son implication dans le processus de réduction des peines et son déchargement de toutes autres fonctions judiciaires afin de mieux lui permettre d’accomplir sa mission, avec un plan de carrière clairement défini et suffisamment attractif.
L’inspecteur de l’administration pénitentiaire Serigne Cheikh BAKHOUM a, dans son exposé, fait un bilan de la situation carcérale au Sénégal qui, de 20.000 détenus en 2000, est passée de 25.990 en 2003 et 36.028 en 2014, d’où une tendance à la surpopulation l’amenant à s’interroger sur l’efficacité des modes d’aménagement des peines sur la politique carcérale. Il a ainsi exposé un certain nombre d’obstacles à la mise en œuvre efficace des modes d’aménagement des peines en l’occurrence l’ambigüité du cadre juridique régissant la matière, le manque de formation des Juges d’application des peines et l’absence de coordination entre politique sécuritaire, politique pénale et politique carcérale se traduisant, notamment, par un recrutement excessif d’éléments des forces de sécurité et un recrutement insuffisant de magistrats. Il a terminé par proposer quelques pistes de solutions comme l’institution de Chambres d’application des peines qui auront vocation à se substituer aux Comités d’aménagement des peines, la distinction claire entre aménagement des peines et peines alternatives, le choix du travail au bénéfice de la société en lieux et places des courtes peines et une meilleure formation du Juge d’application des peines.
Abordant le second sous-thème relatif aux peines alternatives, Monsieur Bara GUEYE, Président de chambre correctionnelle au Tribunal de Grande Instance Hors Classe de Dakar a exposé les différentes peines alternatives et leurs régimes juridiques. Il a également mis l’accent sur l’insuffisance de la législation, notamment sur le travail au bénéfice de la société qui ne constitue pas une vraie alternative à l’incarcération puisque le condamné, pour y être éligible, devra subir les 2/3 de sa peine. Il a, par ailleurs, relevé certains obstacles qui se dressent contre la mise en œuvre des peines alternatives comme (tels que l’ont rappelé les intervenants précédents) l’inexistence des organes de contrôle de la probation. Il a conclu sa communication par la formulation de quelques recommandations comme la prise de circulaires tendant à expliquer et faciliter l’application des textes en matière de peines alternatives, la mise en place effectives des organes tels que le Comité de Suivi en Milieu Ouvert et le Comité d’Aménagement des Peines, une meilleure formation des magistrats les incitant à appliquer les peines alternatives, l’implication des collectivités locales, des Organisations de la Société Civile (OSC), dans la sensibilisation de l’opinion publique pour une meilleure compréhension des peines alternatives, la mise à la disposition du Juge compétent de l’extrait du casier judiciaire lui permettant de prendre sa décision en tenant compte du passé pénal du prévenu et la suppression de l’incarcération préalable exigée pour l’application du travail au bénéfice de la société.
Toujours relativement au sous-thème sur les peines alternatives, Monsieur Abdou Karim DIOP, Substitut général près la Cour d’appel de Dakar a, dans sa communication, déplorée, à l’instar de son prédécesseur, le fait que le travail au bénéfice de la société soit exclu des alternatives à l’incarcération prévues à l’article 707 du Code de procédure pénale. Selon lui, l’élargissement du champ d’application de ce texte au travail au bénéfice de la société aurait permis d’éviter les courtes peines comme c’est le cas en France avec la loi PERBEN qui a pourtant inspiré la réforme sénégalaise. Il a également déploré la pratique des parquets consistant à ne jamais requérir la dispense et l’ajournement de peine qui constituent des alternatives à l’incarcération et a préconisé la mise en place effective des organes comme le Comité de Suivi en Milieu Ouvert. Il a enfin recommandé l’installation de la Commission d’Aménagement des peines au niveau de la Cour d’appel de Dakar, cette commission étant déjà fonctionnelle à Kaolack.
Après ces communications et les débats fructueux qui s’en sont suivis, les participants ont été divisés en deux sous-ateliers dont l’objectif est d’approfondir les différents thèmes présentés et de formuler des recommandations.
A l’issue des travaux en sous-ateliers, les recommandations suivantes, adoptées en plénière, ont été formulées :
I/ Sur la détention provisoire (mandat de dépôt)
Il a été proposé sur ce point des mesures de politiques criminelles et des réformes législatives.
A/Mesures de politique criminelle:
- Ediction de circulaires par le Garde des sceaux, Ministre de la Justice, tendant à inciter les magistrats du parquet à recourir le moins souvent à la détention pour les personnes présentant des garanties de représentation en justice et, de ne placer en détention qu’à titre exceptionnel, les personnes poursuivies pour certaines infractions telles que les blessures involontaires, l’homicide involontaire, le défaut d’assurance, l’abus de confiance, le vagabondage…
- Privilégier la médiation pénale dans certains cas où la détention ne constitue pas la seule solution pour mettre fin au trouble social.
- Limiter les placements en détention de mineurs pour certaines infractions afin d’éviter à ceux-là l’effet corrupteur de la prison.
- Un examen approfondi par les Chambres d’accusation des notices trimestrielles afin de pouvoir remédier aux longues détentions.
- Un usage plus fréquent par la Chambre d’accusation de ses pouvoirs de contrôle administratif et juridictionnel des cabinets d’instruction.
- Recourir le moins souvent aux délégations judiciaires surtout si les diligences à effectuer peuvent être faites par le Juge d’instruction lui-même.
B/Réformes législatives :
- Modifier l’article 63 du Code de procédure pénale dans le sens d’élargir les conditions de délivrance du mandat de dépôt du juge d’instruction, telles que prévues par les articles 125 et 127 dudit code, au mandat de dépôt du Procureur de la république.
- Instituer un référé détention devant la Chambre d’accusation, permettant, non seulement un recours contre la décision de placement en détention du Juge d’instruction, mais également à la juridiction d’appel de statuer à bref délai (deux à cinq jours), sous peine de mise en liberté d’office, sur les recours contre les décisions de refus de placement sous mandat de dépôt et contre les décisions de mise en liberté provisoire prononcées par la juridiction de jugement.
- Encadrer la pratique des retours de parquet qui peuvent faciliter les médiations pénales.
- Prévoir le remboursement échelonné du manquant initial en matière de détournement de deniers publics en vue de faciliter les conditions de liberté provisoire et en même temps sécuriser le remboursement des sommes détournées.
- Sanctionner l’irrespect, par le Procureur de la république, des délais prévus aux articles 129 alinéa 5 et 169 alinéa 2 en permettant au Juge d’instruction de passer outre les réquisitions du Ministère public au-delà desdits délais.
- Correctionnaliser le trafic de drogue.
- Faire des Chambres Criminelles des structures siégeant de façon permanente et non par session.
II/Sur l’aménagement des peines et les peines alternatives :
- Mettre en place les organes prévus par les textes en la matière (Comité de Suivi en Milieu Ouvert, Comité d’Aménagement des peines…) et leur fournir des ressources humaines, matérielles et financières leur permettant de mieux accomplir leurs missions.
- Valoriser la fonction de Juge d’application des peines à travers l’aménagement de locaux adéquats, l’assistance d’un personnel qualifié (Greffier, secrétariat, éducateurs spécialisés…) et une formation solide par des stages et séminaires.
- Décharger le Juge d’application des peines de toutes autres fonctions en instituant un plan de carrière clairement défini et suffisamment attractif.
- Clarifier les choix de politique pénale à travers une distinction claire entre mode d’aménagement des peines et peines alternatives et une sensibilisation des condamnés sur les droits qui leur sont conférés par les textes relatifs à l’aménagement des peines.
- Impliquer le Juge d’application des peines dans le suivi des décisions de libération conditionnelle qui doivent lui être notifiées.
- Un toilettage du décret 2001-362 du 04 Mai 2001 relatif aux procédures d’exécution et d’aménagement des peines afin de simplifier la mise en œuvre des modes d’aménagement des peines.
Telle est l’économie des travaux de l’atelier sur le mandat de dépôt, l’aménagement des peines et les peines alternatives tenu les 10 et 11 novembre 2015 à Dakar (Hôtel LAGON II).
Fait à Dakar le 17/11/2015
Le Rapporteur général, Ahmadou Moustapha FALL
Conseiller à la Cour d’appel de Dakar.