La lettre de l’AFA – Association For Arbitration : Editorial

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Avril 2015 – N°15

S’il est un domaine où l’arbitrage rencontre ses lettres de noblesse, c’est bien celui qui se déroule dans le domaine de la construction.

Pour traiter ce sujet de la 15ème lettre de l’AFA, quatre intervenants ont fait connaître leur point de vue : Monsieur François MULLER, Avocat associé ALTANA, qui évoque l’arbitrage dans les contrats de l’International Federation of Consultings Engineers («FIDIC»), Monsieur Simon NDIAYE, Avocat associé HMN Partners, qui souligne que l’arbitrage international est un mode privilégié de résolution des litiges en matière de travaux publics et Messieurs Laurent JAEGER et Yann SCHNELLER, Avocats associés  ORRICK, qui traitent du problème plus spécifique de l’expertise technique dans l’arbitrage construction.

Pour ces quatre spécialistes de l’arbitrage et du droit de la construction, l’arbitrage est le mode naturel de règlement des conflits.

Selon Maître Simon NDIAYE, l’arbitrage international en matière de construction présente incontestablement un gain de temps substantiel comparé à la justice étatique, permet une meilleure appréhension des aspects techniques par le recours aux experts de parties et permet de préserver la confidentialité.

La difficulté relevée par lui survient lorsque l’arbitrage met en cause une personne publique car se posera le problème de l’arbitrabilité du litige selon qu’il se situe dans le contexte national ou international, bien que l’Arrêt INSERM rendu par le Tribunal des Conflits le 17 mai 2010, semble avoir admis l’arbitrabilité des contrats administratifs internationaux, du moins de manière implicite.

S’agissant de l’extension d’une clause d’arbitrage aux tiers afin d’éviter l’éclatement du contentieux, il fait référence au règlement de la CCI, qui a mis en place des possibilités d’arbitrages multipartites et de jonctions d’instances.

Le règlement de l’AFA ne contient pas de disposition spécifique relative à la pluralité de parties, car il laisse à celles-ci une liberté totale pour l’organisation de la procédure, mais il prévoit dans son article 5- §7, qu’il appartient au Comité d’arbitrage, en cas de pluralité de parties, de nommer tous les arbitres ou l’arbitre unique.

Maître JAEGER et Maître SCHNELLER, quant à eux, soulignent l’importance du recours à l’expert technique dans le domaine de la construction.

Il est certain que dans ce domaine très particulier, l’avis de l’expert est primordial, qu’il soit désigné par le tribunal arbitral ou par les parties, étant souligné que la désignation par le tribunal arbitral n’est, selon les auteurs, pas souhaitable car cela revient à déléguer une partie de la fonction de juger à l’expert.

Les auteurs privilégient le choix d’un expert par chaque partie, à qui incombe la charge de la preuve, afin de convaincre l’arbitre du bien fondé de leurs prétentions. Cette méthode, qui tend à se développer et s’avère très efficace, est inspirée de la méthode anglo-saxonne.

Les auteurs soulignent que, dans le domaine de la construction, le retard dans l’exécution des travaux présente une importance particulière et préconisent l’établissement d’un planning, dont ils abordent l’élaboration en définissant l’analyse d’un «chemin critique», qui permet ultérieurement de déterminer les causes du retard, dans des conditions compréhensibles des spécialistes du droit de la construction.

Les auteurs font également référence au règlement de la CCI, articles 25(3) et 25(4), pour l’administration de la preuve. Dans ce domaine aussi, le règlement de l’AFA laisse aux parties une très grande liberté pour définir les conditions dans lesquelles seront établis les modes de preuve.

Maître François MULLER donne de l’arbitrage dans le domaine de la construction une vision un peu différente, en abordant la question délicate de l’interaction entre les clauses «Dispute Adjudication Board» dites «DAB» et les clauses d’arbitrage international.

Les clauses DAB prévues par les contrats de la FIDIC (Fédération Internationale des Ingénieurs-Conseils) semblent complexes en ce qu’elles prévoient plusieurs étapes.

Leur mise en œuvre permet d’obtenir des décisions qui lient les parties jusqu’au prononcé d’une nouvelle décision par l’autorité compétente pour juger le fond du litige, les difficultés pouvant survenir de la coexistence dans le même contrat de clauses DAB et de clauses d’arbitrage.

Selon l’auteur, les clauses présentent un obstacle à la mise en place d’une procédure d’arbitrage prévue par le contrat, surtout lorsque le mécanisme DAB préalable est obligatoire.

Une autre difficulté est relative à la portée des décisions prises en application des clauses DAB et de leur exécution, et à titre d’exemple, Monsieur MULLER cite deux décisions récentes rendues par la Cour Fédérale Suisse et la Cour Suprême de Singapour qui se sont prononcées sur la qualification des décisions adoptées en application des clauses DAB et le caractère obligatoire de ces clauses.

L’auteur termine son article en soulignant que les exemples et le système sophistiqué FIDIC illustrent les difficultés potentielles d’un système FIDIC, alors qu’il ne doit pas être un obstacle à l’efficacité de la clause.

Quel que soit le mode d’arbitrage envisagé, il apparaît bien qu’il représente le mode privilégié de règlement des litiges dans le domaine de la construction qui est affaire de spécialistes, qui soulignent l’importance du choix de l’arbitrage dans ce domaine, qu’il s’agisse des délais, de l’administration de la preuve ou de l’évaluation du préjudice.

Si l’arbitrage en matière de travaux publics ou plus simplement de construction est affaire de spécialistes, la lecture de cette lettre les incitera à avoir recours à l’arbitrage pour régler leurs différends dans le domaine de la construction publique ou privée.

Ils doivent savoir aussi que le règlement de l’AFA est parfaitement adapté à la mise en place de procédures d’arbitrage dans le domaine du droit de la construction.

Genevière AUGENDRE
Président de l’AFA

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