Impôt sur la plus-value de cession de clientèle d’un cabinet d’avocat : conditions de l’exonération

Jurisprudence

Pour bénéficier d’une exonération d’impôts sur la plus-value de cession de sa clientèle, le cédant doit avoir exploité celle-ci pendant les cinq années précédant la cession. L’avocat, qui avait exercé comme stagiaire salarié moins de cinq ans avant la cession, ne peut être considéré comme remplissant cette condition.

CE 23 juin 2016, req. n° 388969

Un avocat a commencé par exercer comme stagiaire, en 2003 au sein d’un important cabinet et s’est inscrit en 2005 au tableau de l’Ordre des avocats. Il ensuite exercé à titre individuel jusqu’en 2008, puis a rejoint une SELARL dont il est devenu associé et à laquelle il a cédé sa clientèle personnelle. À la suite d’une vérification de comptabilité, la plus-value professionnelle faite lors de la cession de sa clientèle a été imposée à hauteur de 150 000 € pour l’année 2008. L’avocat a demandé le bénéfice de l’exonération d’imposition, prévue par l’article 151 septies du code général des impôts. Le tribunal administratif a fait droit à sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d’impôt et de contributions sociales et des pénalités correspondantes. Le ministre de l’économie et des finances a formé un recours contre le jugement du tribunal administratif et la cour administrative d’appel a annulé le jugement. L’avocat a formé un pourvoi devant le Conseil d’État.

Le stagiaire était-il salarié ?

Les dispositions en cause étaient celles de l’article 151 septies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en 2008, qui permettaient à certaines plus-values de cession d’être exonérées d’impôts à condition que le bien dont la cession a dégagé une plus-value ait été affecté à une activité commerciale, industrielle artisanale ou libérale et que cette activité ait été exercée à titre individuel pendant les cinq ans précédant la cession. Le requérant estimait que ces dispositions pouvaient s’appliquer à son cas et demandait l’annulation de l’arrêt de la cour administrative d’appel. Il soutenait notamment que les juges d’appel, qui avait constaté qu’il avait exercé en qualité de stagiaire au sein d’un cabinet dans les cinq ans précédant la cession de sa clientèle n’avaient pas préalablement recherché s’il était ou non salarié. L’argument est reçu par le Conseil d’État qui a annulé la décision de la cour, mais évoqué l’affaire.

Refus de produire le contrat

Dans son mémoire devant le Conseil d’État, le ministre a indiqué que le requérant lui-même avait indiqué avoir effectué son stage en qualité de salarié, avoir perçu des salaires et les avoir déclarés au titre de son impôt sur le revenu, mais il a refusé de produire le contrat de travail. L’avocat n’a pas sérieusement contesté ces allégations devant la haute juridiction administrative et les Conseil d’État a considéré, en conséquence, qu’il n’avait pu constituer une clientèle personnelle qu’à partir de 2005, date à laquelle il a cessé d’être stagiaire salarié pour exercer en individuel. Il ne remplissait donc pas, en 2008, la condition de durée d’exercice de l’activité de cinq années, posée par les dispositions précitées du code général des impôts.

Régularité de la vérification de comptabilité à l’origine du redressement

Le Conseil d’État a examiné les autres moyens du requérant, qui contestait la régularité de la vérification de comptabilité ayant donné lieu au redressement contesté. L’avis de vérification, qui concernait l’activité individuelle de l’avocat, avait été envoyé au siège de la société au sein de laquelle il était associé, qui était l’adresse où il exerçait auparavant en individuel. Les mentions figurant dans l’avis étaient parfaitement claires et ne créaient aucun doute sur l’identité du contribuable visé par la vérification. Par ailleurs, l’avocat ne peut reprocher à l’administration fiscale d’avoir conduit les opérations dans les locaux, alors qu’informé par le vérificateur de la possibilité qu’elles aient lieu dans un autre endroit (au domicile du contribuable ou dans les locaux de l’administration), il n’a formulé aucune demande en ce sens. Enfin, le requérant ne peut soutenir que l’administration a utilisé des renseignements émanant de tiers alors qu’il a lui-même communiqué aux agents vérificateurs une attestation de son bâtonnier sur le début de sa carrière et qu’il a apporté des précisions sur ce point lors des entretiens avec l’administration.

par Anne Portmannle 28 juin 2016 | Source : http://www.dalloz-actualite.fr/