«
Ecrire, c’est tenter de suivre les traces de sa propre énigme » lit-on dans les premières pages de
Appelez-moi Lorca Horowitz[1], le dernier roman d’Anne Plantagenet, née en 1972. À partir d’un bref article paru dans Elle, l’auteur enquête sur l’histoire vraie de cette secrétaire qui a tenté de réussir sa vie en détruisant celle de ses patrons. Alternent ainsi la voix de l’héroïne criminelle racontant sa coupable ascension et celle de l’auteure. Ce jeu de miroirs est proprement hallucinant entre la fiction qui donne vie à un trouble personnage ayant existé et un récit d’auto-fiction. Car l’Andalousie où se sont déroulés les faits est le pays où l’auteure, douze ans plus tôt, a suivi un homme après avoir abandonné son époux. Retrouver les traces de ses élans amoureux antérieurs dans des lieux où elle recrée la vie de Lorca Horowitz est une première aventure intérieure. Découvrir que cette dernière a pu accéder à l’existence dont elle rêvait en phagocytant sa patronne ouvre un abîme. On trouvera rassurante l’émouvante sincérité avec laquelle Anne Plantagenet se livre face à cette terrifiante histoire de dévorations.
Les sept nouvelles qui composent le recueil intitulé Pour les siècles des siècles[2] font encore la part belle à l’autobiographie. Dans ces courts récits consacrés à l’amour sous toutes ses formes, de celui qui commence à celui qui s’achève, de l’un qui hésite à l’autre qui renonce, on lit toute la sensibilité et la sensualité d’une femme qui exige beaucoup de ce sentiment infini, mais on pourra préférer l’hymne éblouissant au lien inaltérable qui réunit dans le grand âge et jusqu’à leur mort ses grands-parents adorés.
Trois jours à Oran[3] relate le voyage du souvenir dans lequel Anne Plantagenet a réussi à entraîner son père, pour ses soixante ans. Lui, reconstitue non sans mal les endroits où il a vécu et qu’il a quittés quarante-cinq ans avant. Pas de tourisme sur cette terre qui sort à peine de la décennie noire et des ravages du terrorisme. Un accueil timide mais bienveillant. Elle, ne peut que répéter ce qu’on lui a raconté et qui constitue malgré tout ce qu’elle nomme « ma part d’héritage ».
Au travers de ces trois petits livres, très différents et pourtant traversés de récurrences qu’on débusque avec plaisir, se dessine le portrait d’une femme attachante et d’une auteure qui émeut.
[1] Editions Stock 2016 210 pages
[2] Editions Stock 2008 158 pages + J’ai lu 2009
[3] Editions Stock 2014 175 pages + J’ai lu 2015
Source : http://larevue.squirepattonboggs.com